Si son esprit n’était pas léger, on pouvait dire que son paquetage, lui, l’était. Rien de plus qu’un sac à dos dans lequel était rangé une paire de gants, un casse-croûte, un portefeuille et quelques pokéballs.
Depuis sa rencontre avec Bonnie, il s’était ravisé et avait enfin compris qu’il y avait différent type de dresseurs pokémons : ceux qui ne les entrainaient que pour les faire combattre, ceux qui les utilisait comme aides gratuites et ceux qui étaient juste amoureux de leurs compagnons et qu’ils traitaient comme des amis. C’était vers cette dernière catégorie qu’Owen aspirait et il comptait bien s’entourer le plus possible et surtout le mieux possible pour sa nouvelle vie… Essayer de se recréer un semblant de famille et avoir une bonne raison de se lever le matin.
De plus, il ne savait pas vraiment à quoi s’attendre dans sa quête de réponse et même s’il n’était pas adepte des combats Pokémons, il se doutait que ses recherches l’emmèneraient surement dans des endroits ou des situations dangereuses et, malgré sa témérité, il fallait réfléchir un minimum à sa sécurité.
Il aurait besoin d’une fine équipe, une équipe qui aura confiance en lui et qui il aura confiance pour travailler main dans la main.


A peine arrivé à Carmin-sur-Mer, il croisa le chemin d’un petit groupe d’Axoloto. Ils avaient l’air heureux et malgré lui, Owen ne put s’empêcher de sourire à la vue des petits pokémons bleus. Il s’arrêta un instant pour les observer passer et continua son chemin en direction du port.

Owen et Bonnie n’avaient pas fait plus de deux cents mètres avant de se rendre compte qu’ils étaient suivis. A peine avaient-ils laissé passer les Axoloto qu’à chaque pas ils avaient l’impression d’entendre deux autres paires de jambes les suivre. Ils avaient beau essayer de jeter des coups d’œil discrètement, ils ne voyaient personnes derrière eux. Finalement, le garçon et son osselait s’arrêtèrent pour faire face à leurs suiveurs… mais personne.
Finalement, après quelques minutes à attendre que quelque chose se passe, ils se résignèrent et recommencèrent leur chemin. Aussitôt, ils entendirent une nouvelle fois, les pas derrière eux.
Ni une, ni deux, Bonnie se retourna avec une rapidité inattendue en brandissant son os comme une arme, prête à assommer quiconque les suivait mais elle s’arrêta nette.


Un Phanpy.
Ce n’était donc pas deux paires de jambes mais quatre pattes qui les suivaient depuis quelques mètres déjà. « File petit » tenta Owen en faisant un geste de la main, mais rien n’y faisait et la créature ne semblait pas vouloir bouger. « Aller, rentre chez toi » mais rien. « Laisse tomber Bonnie, on y va. »
Ils faisaient mine de ne rien en entendre en espérant que le Phanpy s’en irait, mais ils continuaient à entre ses pas derrière eux. « Bon, qu’est-ce que tu veux ? Tu n’as personne où rentrer ? » Owen s’empara d’une pokéball dans son sac à dos et la brandit devant le Phanpy « Tu veux que je t’attrape c’est ça ? » Il restait circonspect mais tenta sa chance et envoya une Superball sur le petit éléphant bleu.

( - ) 1 Superball.
( + ) 1 Phanpy, mâle, niveau 10.

Owen n’en revenait pas… Il l’avait fait. Il avait capturé son premier Pokémon… A 18 ans, certains diraient qu’il était temps !
Il regarda la ball bleue pencher de droite à gauche jusqu’à s’arrêter en émettant un petit son qui annonçait que la capture était bien effective. Les yeux du jeune homme restèrent fixés sur la Superball une longue minute jusqu’à ce qu’il reconnecte enfin ses neurones et qu’il ait de nouveau les idées au clair. Il s’empara aussitôt de l’objet et en fit sortir son contenu.
Un magnifique Phanpy, tout bleu et guilleret qui s’approcha de Bonnie et lui avec entrain.

Ça faisait un mois maintenant qu’il n’avait pas souri une seule fois. Il fallait dire que Bonnie avait été un soutien de taille dans cette épreuve mais elle n’essayait pas forcément de lui changer les idées. Elle était à ses côtés pour le pousser à avancer, à creuser, à réfléchir mais toujours en gardant l’objectif en tête : retrouver la mère d’Owen ou comprendre sa disparition.
A côté d’eux, ce Phanpy respirait la vie et la bonne humeur, comme s’il avait été attiré par leurs mauvaises ondes et qu’il espérait remettre un peu de couleurs dans leur vie.
Et c’était chose faite. Aussi simplement que ça… Owen souriait.
Il ne pouvait pas s’en empêcher.
Ce Phanpy, joviale, avec un côté naïf et des gestes maladroits, lui mettait du baume au cœur.

Alors qu’Owen commençait à se perdre dans ses pensées, repensant aux bonnes nuits qu’il passait encore quelques mois auparavant et aux petits déjeuners copieux du lendemain matin, un bruit qui ressemblait aux roues d’un vélo ou d’une voiture sur un chemin de terre se fit entendre.
Quelques secondes plus tard, déboula devant lui une sorte de roue bleue qui traversa le chemin sans s’arrêter. Un coup d’œil à son Phanpy et il comprit. Encore un ! Mais… est-ce qu’il venait de capturer un Phanpy qui n’avait rien demandé ? Qui avait une famille et aspirait sûrement à vivre ici le restant de ses jours ?
Le cœur d’Owen battait la chamade, qu’avait-il fait ?

Il s’accroupit aussitôt auprès de son Phanpy et le regarda fixement dans les yeux. « Dis-moi que je n’ai pas fait ça ? » Évidemment, il ne s’attendait pas à une réponse claire de la part du Pokémon mais finalement la réaction de l’éléphanteau fut tout à fait claire lorsqu’il s’approcha pour poser sa trompe sur le genou d’Owen.
Visiblement, s’il avait bien vu passer un autre Phanpy, celui d’Owen ne semblait pas du tout intéressé pour le suivre. Il était resté immobile, proche de son "dresseur", toujours un air joyeux sur le visage.

Il ne le quitterait plus.

Il se retourna pour se mettre dos à l’arène, regard vers le large.
Il essayait de se contrôler mais les émotions étaient trop fortes. Elles remontaient, remontaient et bientôt ce qui devait arriver arriva : une larme se mit à couler sur sa joue… Puis deux, puis trois, puis ce fut un flot continu qui perlait sur son visage.

Bonnie posa sa patte libre sur la jambe de son ami tandis qu’au coin de ses yeux aussi, des larmes commençaient à se former. Owen s’accroupit pour se mettre à sa hauteur. Il savait qu’elle pleurait pour les mêmes raisons et parce qu’elle avait le don de ressentir toutes les émotions du garçon. Il essuya les larmes de Bonnie avec le revers de sa main et essaya d’esquisser un sourire.
Un jour peut-être ils se rappelleraient de leur mère en souriant et garderait en tête les bons moments passés… Mais pour le moment c’était beaucoup trop tôt.

Hathi s’empressa lui aussi de venir essuyer les larmes d’Owen avec sa trompe et alors que le jeune homme était sur le point de se relever, un Axoloto, puis deux, puis trois, puis tout un groupe sortait la tête de l’eau juste devant lui.
C’était presque comme s’ils l’avaient entendu et qu’ils étaient venus lui apporter un petit soutien moral.

Une fois ses larmes séchées, Owen fit un signe de la tête aux Axoloto qui, comme ils étaient apparus, disparaissaient l’un après l’autre dans l’eau.
N’ayant pas le cœur à rentrer dans l’arène, le jeune homme se dirigea vers l’embarcadère… De magnifiques bateaux étaient amarrés et des pêcheurs et voyageurs se partageaient l’endroit. Certains semblaient revenir de pêche tandis que d’autres s’apprêtaient à partir. Certains semblaient revenir d’excursion, d’autres semblaient sur le point de partir en vacances. C’était intéressant de voir tous ses gens réunis ici pour des raisons diverses.
Lui déambulait en admirant les bateaux de toutes les couleurs et en s’imaginant vers quelles destinations incroyables ces embarcations avaient pu naviguer.
D’un coup, un cri strident le tira de ses rêveries. A quelques mètres de lui, un oiseau qu’il n’identifiait pas encore avait plongé vers le sol et semblait donner des coups de becs sur une pierre marron.
En s’approchant un peu plus, Owen se rendit compte qu’il ne s’agissait pas du tout d’une pierre mais d’un petit Marcacrin.

Le garçon se précipita pour essayer de faire fuir l’oiseau – une Roucool – mais rien n’y faisait, il n’arrivait pas à attendre le Pokémon sans défense.
Une idée lui traversa alors l’esprit et sans hésiter une seconde de plus, Owen se saisit d’une Pokéball et la lança en direction du petit cochon.

( - ) 1 Pokéball.

C’était raté.
La Roucool, apparemment plus habile qu’Owen, envoya valser la Pokéball qui n’eut pas le temps d’atteindre sa cible.
Mais il n’allait pas en rester là, c’était hors de question. Il ne savait pas s’il était en train de se faire des films ou si c’était la réalité mais il avait l’impression d’entendre les petits cris du cochon sous les cris stridents de l’oiseau qui semblait vouloir en découdre… Mais ce dernier ne savait pas à qui il avait à faire ! A la vue de cette scène, jamais au grand jamais, le garçon aurait pu s’en aller et laisser faire. Il fallait qu’il aide le Pokémon sans défense à s’en sortir… Bien sûr comme tous les habitants de la région, Owen était familier des combats Pokémons… Enfin… Disons qu’il avait déjà assisté à quelques combats mais il n’en avait jamais fait et jusqu’à présent s’était toujours dit qu’il n’en ferait jamais. Du coup, malgré ses connaissances basiques en la matière, il ne savait pas vraiment comment s’y prendre pour qu’Osselait ou Phanpy puisse lui venir en aide.
Impuissant face à la situation, il s’empara d’une deuxième Pokéball. Cette fois-ci, sans précipitation, Owen attendit une meilleure fenêtre de tir en espérant prendre l’oiseau par surprise et pouvoir mettre le petit Marcacrin à l’abri…

Maintenant !

( - ) 1 Pokéball.
( + ) 1 Marcacrin, femelle, niveau 10.